La France a brutalement mis fin à la monarchie en 1792. Elle a scellé ce choix, en 1793, en livrant son « dernier tyran », Louis XVI, au tranchant de la guillotine. Tout au long du XIXe siècle, elle n'a cependant cessé, au gré des restaurations et des révolutions, de tergiverser entre la monarchie et la république, jusqu’à ce que celle-ci s'impose définitivement en 1875. Les Français ont cependant conservé une conception étrangement royale des institutions de l'État et, plus particulièrement, de la présidence de la République. La phase de transition entre la présidence de Nicolas Sarkozy et celle de François Hollande nous en a donné un nouvel exemple et démontré qu'en France, « le roi ne meurt jamais » et que, pour reprendre le vieil adage, « le mort saisit le vif ». C’est ainsi qu’on a entendu, dès le 6 mai au soir, le président sortant reconnaître sa défaite et saluer son successeur, un peu comme l'avait fait Louis XIV, dans les derniers jours de sa vie, quand, faisant venir auprès de lui le futur Louis XV, il lui dit : « Mignon, vous allez être un grand roi… ». Le mourant ainsi transmettait, à l'avance, son pouvoir au vivant et témoignait ainsi que la fonction royale ne connaîtrait aucun intermède. Par l’élégante initiative d’une couronne (tient, une couronne !) déposée conjointement par lui-même et par François Hollande sur la tombe du soldat inconnu, Nicolas Sarkozy renouait avec une antique tradition monarchique, celle de l'association, par le roi régnant, de son successeur à son règne, un peu comme l’avait fait, dès 987, Hugues Capet, avec son fils, Robert.
Le vieux principe de l'instantanéité de la transmission de la couronne a trouvé dans le rituel républicain un nouveau souffle qu'illustrera encore une fois, le 15 mai prochain, la passation de pouvoir au cours de laquelle le nouveau chef de l’État deviendra « Grand Maître des ordres du roi », en l’occurrence le 28e Grand Maître de l’ordre de la Légion d’honneur.
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