Le Blog de Jean-Jacques Aillagon

Les Adieux à la reine

Au Château, tournage de l’adaptation par Benoît Jacquot du roman de Chantal Thomas, "les Adieux à la reine". Dans la cour, je surprends cette conversation, au cours d’une pause, entre Madame Campan et Rose Bertin…

Débat

J’ai récemment eu l’occasion d’évoquer avec le Président de la République l’avenir de l’Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles, au-delà notamment du mois d’octobre qui marquera mon 65e anniversaire. Le Président m’a indiqué qu’il ne prendrait aucune décision précipitée sur ce sujet auquel il manifeste un intérêt soutenu et qui relève, par ailleurs, je le rappelle, du domaine de compétence du ministre de la Culture. Il est probable que j’aurai l’occasion de lui en reparler au cours des prochains mois.
Je précise que j’ai toujours estimé que la décision que prend parfois, souvent ces derniers temps, le gouvernement de "déplafonner" l’âge de la retraite de responsables d’institutions culturelles ne relève que de sa responsabilité. Il s’agit, dans l’état actuel des choses, d’une faculté confiée à sa discrétion et à son discernement et non d’un droit automatique que pourrait faire valoir celui qui en serait le bénéficiaire. Cela signifie, à mes yeux, que cette prolongation exceptionnelle d’activité ne se sollicite pas. Elle s’accepte ou se refuse quand elle est proposée.
Par ailleurs, on le sait, j’estime que la nomination à la tête des établissements nationaux est bien une prérogative du gouvernement. Elle traduit, entre autre, s’agissant d’établissements culturels, les partis-pris, les choix, les objectifs de la politique culturelle. Cette prérogative s’exerce dans tous les cas, qu’il s’agisse d’une première nomination, d’une reconduction ou d’une prolongation au-delà de l’âge de la retraite.
Je crois avoir su, au cours des quatre années écoulées, donner à Versailles un surcroît de visibilité et à la fonction de président de son établissement une autorité très forte. Les ambitions que suscite aujourd’hui ma possible succession sont à cet égard un excellent signe. Il convient, cependant, que chacun mesure bien que Versailles n’est pas une sinécure mais une vraie mission qui exige du métier, de la compétence, de la disponibilité, du désir de servir et de la passion.
Je lis, par ailleurs, dans le Figaro de ce matin quelques commentaires du vicomte de Rohan, ancien Président de la Société des Amis de Versailles, qui estime que le président de Versailles ferait " ce qu’il veut ". Ce que je sais c’est que le président de cet établissement n’a surtout pas vocation à faire ce que voudrait le président de sa société d’amis, surtout quand celui-ci, comme c’est, hélas, le cas pour M. de Rohan, est animé, quelles que soient par ailleurs ses qualités que je respecte, par un permanent ressentiment, une fatale acrimonie et un insupportable sentiment de supériorité aristocratique. En revanche, je sais aussi que cet établissement, quel que soit son prestige et quelle que soit l’autorité de celui qui le dirige, est bien placé sous la tutelle du ministre de la Culture dont les représentants siègent à son Conseil d’Administration et y remplissent parfaitement leur rôle. Il est vrai que le Vicomte ne fait pas mystère de son mépris pour les fonctionnaires, préférant visiblement les privilèges et l’influence que donne l’appartenance à une caste à l’autorité que les agents publics tiennent de la République !

 

Visite du roi du Bamoun, Ibrahim Mbombo Njoya, le 9 mai 2011 à Versailles

Arnégonde again

On rend aujourd’hui la tête de Maori du Muséum de Rouen à la Nouvelle-Zélande. Pour des raisons que personne n’explique, on n’est, dans le même temps, pas foutu de replacer les restes de la Reine Arnégonde à Saint-Denis. Ces restes, exhumés en 1959 par Michel Fleury, ont été largement étudiés. Ils attendent leur sort dans une boîte, sur une étagère du Musée national des Antiquités de Saint-Germain-en-Laye. La pauvre Arnégonde ne pourrait-elle retrouver sa sépulture, dans ce qui allait devenir la nécropole royale française ? C’était sa volonté. La volonté posthume des Hommes, quand elle concerne leur sépulture, a-t-elle une date de péremption ?

Marigot sportif

Je suis effaré par la place qu’occupent dans les médias, journaux, radios, télés… les affaires du football français. Aux matchs, à leurs résultats, aux commentaires qu’ils inspirent, aux championnats et aux ligues, à leurs pronostics, s’ajoutent des infos incessantes sur les violences dans les stades, les révoltes des supporters contre les entraîneurs et les expressions bureaucratiques (l’institution de quotas) ou populaires (la profusion des insultes) du racisme. Tout cela conduit bien loin de l’horizon présumé de l’idéal sportif. Je trouve cela lassant, indigne mais aussi effrayant parce que révélateur des maux les plus profonds de la société française qui a décidément beaucoup de mal à vivre sereinement avec elle-même. Dans ce contexte, le comportement digne de Jean Tigana qui dit ASSEZ ! et claque la porte est un réconfort.

Fête nationale

La France célèbre la fin de la guerre de 39-45. Le grand pavois a été hissé sur le château de Versailles. Je suis toujours très heureux de voir le drapeau de la France flotter sur le Château de son histoire.

Daniel Buren à Metz

Je passe la journée à Metz pour y travailler aux premières actions de l’Association des Amis du Centre Pompidou-Metz que je préside ([email protected]/Tel : +33 (0)3 87 15 52 59).
Le Centre a métamorphosé Metz et donné à cette ville un joyeux air de jeunesse que souligne encore le temps estival qui enchante les promeneurs. Passant par la ville, je vais à la cathédrale. J’y croise Norman Rosenthal, ancien directeur de la Royal Academy, venu pour Buren. Norman s’extasie devant l’élévation de la nef et se dirige vers le transept pour y découvrir les vitraux de Chagall. Une fois encore, dans la galerie 3 (la plus élevée du Centre Pompidou), Daniel Buren démontre son intelligence très fine de la plasticité de l’espace. Il s’y livre à un magnifique exercice d’introduction de l’image de l’extérieur, à l’intérieur du bâtiment, grâce à un subtil jeu de miroirs, un peu comme Mansart l’a fait à la galerie des Glaces. En ce moment le Centre Pompidou-Metz est donc une sorte d’hommage au château de Versailles. L’architecture y abolit la frontière entre le dedans et le dehors. Cette installation de Buren est visible jusqu’au 9 septembre prochain. Les deux murs latéraux de la galerie 3, couverts de miroirs (déformants), se renvoient à l’infini les mêmes images dont celles des visiteurs, me rappelant l’émotion que suscitait en moi, il y a cinquante ans, la pâtisserie Rogie, rue Serpenoise, à Metz également. Quand je passais mes vacances chez ma tante, Tata Mimi, à Pange, chacune de nos sorties à Metz (c’était la grande sortie des vacances…), était célébrée par une visite au salon de thé Rogie qui me faisait l’effet d’une " merveille du monde ". Les deux murs latéraux de ce salon, long et étroit, étaient recouverts de miroirs qui mettaient " en abyme " les éclairs au café et les tartes à la mirabelle dont je raffolais. Dans la même rue, on me conduisait, une fois l’an, chez Lion Frères, pour m’acheter un ou deux pantalons. J’étais très fier de ce droit au " chic messin "… La rue Serpenoise s’est aujourd’hui, comme toutes les artères principales des villes de province, terriblement banalisée.

Elections cantonales

Aujourd’hui je ne vote pas. La commune dans laquelle je suis inscrit sur les listes électorales n’appartient pas à un canton dont le conseiller général est renouvelable. Dimanche dernier, le taux d’abstention a été impressionnant puisque plus de la moitié des électeurs ne s’est pas rendue aux urnes ! Il est vrai que ce scrutin est incompréhensible. Qui sait ce qu’est un canton en dehors des zones profondément rurales où cette circonscription correspond encore à une réalité territoriale et humaine ? Combien de nos concitoyens comprennent clairement les rôles spécifiques des conseils municipaux, généraux et régionaux ? Et puis, comment rendre accessible aux citoyens ce scrutin où seule la moitié des cantons est concernée à chaque élection et qui jamais ne concerne Paris, puisque le conseil municipal y fait fonction de conseil général ?

Tout cela me conduit à réaffirmer qu’il y aurait une vraie nécessité pour la qualité de la vie démocratique :

1)    à redéfinir la cartographie des entités communales, départementales et régionales sur des bases démographiques, économiques et géographiques raisonnables. Il est patent que chacune de ces collectivités ne peut pas valablement exercer ses missions spécifiques si sa population se situe en-dessous d’un certain seuil critique que j’aurais tendance à fixer à 5 000 habitants pour les communes, 500 000 habitants pour les départements et 2 millions pour les régions ;

2)    à veiller que, tout en maintenant un vote spécifique pour chacun des scrutins nécessaires à la désignation par les citoyens de leurs élus dans les assemblées de ces collectivités, on réunisse certains d’entre eux dans des séquences électorales communes. Quatre séquences me semblent pertinentes :
•    Les élections municipales pour les communautés des actuelles communes qui auraient vocation à former de nouvelles entités communales ;
•    Les élections territoriales au cours desquelles seraient désignés, dans toute la France, y compris Paris, les conseillers généraux et régionaux ainsi que les Sénateurs. La carte des départements et des régions devrait être radicalement redéfinie et un département de la Seine reconstitué ;
•    Les élections législatives ;
•    L’élection présidentielle.
S’agissant de la périodicité de ces élections, j’estime que le septennat est la bonne mesure pour le mandat du président de la République, le quinquennat pour les députés et six ans pour les élections territoriales, municipales et sénatoriales.

Etoile Royale

J’ai déjà présenté dans ce blog le projet de rétablissement de l’étoile royale autour de laquelle s’organise le parc du Château, à l’extrémité du Grand Canal (blogs du 16 avril et 16 septembre 2010). Ce vaste chantier est en train de s’achever. C’est la société Colas, filiale de Bouygues, qui a réalisé la requalification des voieries dans le cadre de son mécénat de compétence. Par ailleurs, il fallait replanter quelques centaines de tilleuls. Le coût complet de la plantation d’un arbre (achat, transport, préparation du terrain, plantation proprement dite, entretien pendant l’année de reprise) s’élève à 1000 €.
 Moët-Hennessy a d’emblée déclaré son intérêt pour cette action et lui a apporté son soutien, devenant ainsi le parrain et le premier mécène de cette campagne. J’ai, par ailleurs, lancé un appel à la générosité des particuliers et des entreprises. Dès aujourd’hui une dame de Rouen a appelé pour adopter un arbre en l’honneur de la naissance de son petit fils… Puissent beaucoup d’autres particuliers ainsi concourir au rétablissement de la beauté du parc de Versailles.
Les déclarations d’intention d’adopter un arbre (ou plusieurs) sont à m’adresser (Jean-Jacques Aillagon, Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles / RP834 / 78008 Versailles cedex – Renseignements : 01 30 83 77 04 – Mail : [email protected]). Je rappelle que les dons reçus ouvrent une réduction d’impôts de 66% pour les particuliers et de 60% pour les entreprises, conformément aux dispositions de la loi sur le mécénat et les fondations.

Trônes

Le Roi du Maroc, Mohammed VI, prononce à la télévision, un discours pour annoncer un train de réformes politiques. La mise en scène de cette intervention a été réglée de façon très subtile. Le Roi est assis, en avant de son trône, ample fauteuil rococo placé sur une estrade, en situation de détenteur de l’autorité. Il est encadré, affirmation de la continuité dynastique et donc du caractère héréditaire de la monarchie, par son fils et héritier, à droite, et par son frère, à gauche. L’annonce de mesures de démocratisation de la vie publique ne signifie donc pas un quelconque renoncement à l’affirmation du caractère transcendant de l’autorité royale et cela d’autant plus que le monarque s’affirme également comme le commandeur des croyants. Les trois personnages qui forment ce tableau sont habillés à l’européenne et même avec un chic un peu désuet (épingles et barrettes à cravates…) pour bien manifester que le roi est apte à accomplir la synthèse entre l’attachement à la tradition que figurent le décor et les drapeaux bien chérifiens, et la modernité, c’est-à-dire l’appartenance du Maroc à un monde global.

Un petit bouquet de roses a été déposé devant l’héritier du trône, symbole de fraîcheur, de renouveau et d’espérance, une manière, peut-être, de dire le printemps.

Vie politique

Un sondage pour Le Parisien place Marine Le Pen en tête du premier tour de l’élection à la présidentielle à 23 %. Je ne suis pas sûr qu’il faille en tirer des conclusions sur ce que sera la configuration de cette élection en 2012, dans plus d’un an donc. Toujours est-il que ce sondage marque la réelle puissance de l’enracinement politique ou plutôt le nouvel enracinement du Front National dans l’électorat français et donc dans la vie politique. Cette situation pose une nouvelle fois, à mes yeux, la question de la vraie anomalie que constitue l’impossibilité pour cette formation politique (et pour d’autres qui se sont retrouvées dans cette situation) d’accéder à une représentation nationale et donc parlementaire suffisante. On ne peut pas estimer que les systèmes électoraux n’auraient comme objet que de former des majorités incontestables et d’éliminer la représentation inopportune de certains partis ou mouvements politiques. Si on juge que tel ou tel parti contrevient aux principes mêmes du droit et de la démocratie, il faut tout simplement l’interdire. A partir du moment où l’activité d’un parti n’est pas jugée illicite, il convient de s’interroger sur sa représentativité et donc sur sa représentation. Le Front National a des conseillers municipaux, très peu, des conseillers régionaux, des députés européens. Il n’a aucun député, aucun sénateur. Est-ce sain ? Est-ce normal ? Je ne pense pas.

C’est la raison pour laquelle, alors que je déteste la formule trop politicienne, de la « dose de proportionnelle » qu’on envisage parfois d’introduire dans les scrutins, j’estime qu’il conviendrait peut-être parce que nous avons deux assemblées, que l’une, l’Assemblée Nationale, continue d’être élue au scrutin uninominal à deux tours, dans le cadre d’une géographie des circonscriptions revue, et que l’autre, le Sénat, soit élue à la proportionnelle, dans le cadre régional. Le choix du cadre régional pour l’élection des sénateurs renforcerait d’ailleurs le rôle de cette circonscription politique dans la vie de notre pays et appellerait sans doute une refonte de la cartographie qui la conditionne.