Google vient d’accomplir une révolution sémantique. La rubrique "actualités" de la barre de navigation renvoie désormais à une sélection d’articles de presse regroupés non plus sous le titre de "divertissement" mais sous celui de "culture". La nuance peut paraitre sans grande conséquence. Elle est, en réalité essentielle. Elle traduit, de la part du méga fournisseur d’accès, un désir d’acculturation et donc d’adaptation, aux valeurs de l’espace culturel français dans lequel il opère. Le choc idéologique entre la culture et le divertissement fut, au cours des dernières décennies, au cœur même des tensions entre le nouveau monde, attaché au "Main Stream", cette culture qui "plaît à tout le monde", et une partie du vieux monde attaché à sa singularité culturelle. C’est cette tension qui a alimenté les inépuisables négociations entre le cinéma français et la Motion Picture association of America, notamment à l’époque, héroïque de son "boss" Jack Valenti. C’est elle qui explique le refus des États-Unis d’approuver la Convention de l’UNESCO sur la diversité culturelle, texte apportant une justification, dans l’ordre du droit international, à toutes les mesures que prennent ou prendraient les États pour protéger et promouvoir leur patrimoine et leurs productions culturelles. Ce texte soumet, en quelque sorte, s’agissant des biens culturels, les règles ordinaires du commerce international à une logique supérieure et impérative. De façon tacite et par un biais sémantique, Google se range donc de façon étonnante, à ce point de vue au moment même ou la multinationale mesure la nécessité de mieux s’adapter aux réalités des différents territoires auxquels elle propose ses services.
Article publié le 3 octobre 2013 dans L'Opinion
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