Dans quelques jours, une conférence de presse au ministère de la Culture et de la Communication marquera l’ouverture de la saison de la Turquie en France. Stanislas Pierret qui fut conseiller culturel dans ce pays alors que Paul Poudade y était ambassadeur, en assure le commissariat général.
La Turquie a, depuis la conquête complète de l’Empire byzantin par les Ottomans, partagé le destin de l’Europe. Ne la disait-on pas, au XIXe siècle, « l’homme malade de l’Europe » ? Les traités qui conclurent la première guerre mondiale, notamment celui de Sèvres, disposèrent de son sort en tant que puissance européenne qui avait fait le choix d’une alliance avec l’Allemagne.
Peut-elle intégrer l’Union européenne ? Quand on est à Istanbul, on répond sans hésiter positivement, tant cette ville est européenne. Elle l’est d’ailleurs selon les codes d’une géographie sommaire qui fixerait la frontière du continent sur le Bosphore. En Anatolie orientale, la réponse est spontanément moins évidente et cela d’autant plus que la revendication kurde installe au sud-est de ce territoire une possible instabilité.
Je pense cependant que l’Europe étant déjà devenue un vaste territoire rassemblant des populations éthiquement et culturellement diverses, et la détermination de la Turquie à adhérer à l’Union étant ce qu’elle est, on ne peut pas éluder la question, sauf à considérer, ce que le Traité constitutionnel n’a pas fait, que c’est l’appartenance à la Chrétienté qui est le symptôme d’un possible apparentement à l’Europe. Ce raisonnement poserait d’ailleurs à terme la question de la situation des pays balkaniques qui sont majoritairement musulmans ou abritent une forte minorité de citoyens relevant de cette tradition religieuse.
S’agissant de la Turquie, il est des questions qui devraient, en amont de toute hypothèse d’adhésion, être abordées, comme celles de la démocratie, de la laïcité, du règlement des contentieux de mémoire, avec notamment les Arméniens, de la clarification de la position de ce pays à l’égard de Chypre. L’adhésion à cette totale laïcité qu’avait voulue Atatürk devrait d’ailleurs se traduire par plus de tempérance à l’égard de l’Eglise orthodoxe dont le patriarche subit d’inutiles vexations et d’inadmissibles brimades. Si la Turquie accomplissait ce chemin, je ne verrai, pour ma part, pas d’inconvénient à ce qu’elle rejoigne le cercle de l’Union européenne. Après tout, l’Empire Romain a bien régné sur trois continents : l’Europe, l’Asie et l’Afrique.
Un correspondant m’écrit à ce sujet : « L’arrivée au pouvoir d’une majorité islamo-démocrate contribue à moderniser le pays, en conduisant des négociations fructueuses avec l’UE, en dégelant les crispations laïcistes du pouvoir militaire, en dégelant la question kurde (accès à des médias en langue kurde notamment) et arménienne : le séjour du président Gül à Erevan il y a quelques mois –certes pour assister à un match de foot : on retrouve la diplomatie du ping-pong du président Nixon…- aurait été impensable… »
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