Société des Amis
Conversation avec Olivier de Rohan, Président de la Société des Amis de Versailles depuis 1987. Il me confirme qu’il aimerait « passer la main » lors de la prochaine assemblée générale de son association.
La relation entre les musées et leurs sociétés d’amis est souvent heureuse mais parfois aussi complexe. Les musées doivent éviter de les considérer comme de simples diverticules de leur propre action, sans cette autonomie qui fonde l’idée même d’association. En retour, les associations ne peuvent pas s’ériger en contrepouvoirs qui disposeraient d’une légitimité susceptible de contrarier celle de la direction de ces établissements. La relation des deux entités suppose donc du respect et de la considération réciproques et, surtout, de la connivence, de la complicité affectueuse. Il convient aussi de bien affirmer la nécessaire capacité de ces associations à se procurer des ressources propres, réelle traduction de la volonté des associés de mobiliser, par leurs contributions ou leurs initiatives, des moyens pour contribuer aux projets du musée qu’ils soutiennent. Ces ressources ne peuvent pas majoritairement provenir de la délégation, formelle ou informelle, que leur feraient les établissements de la possibilité de commercialiser des titres d’adhésion qui ne seraient, en fait, que des « laissez-passer annuels » dont la vente relève de la politique de développement du public des mêmes établissements, surtout quand il s’agit d’établissements publics au sens juridique du terme.
Olivier de Rohan aura, au cours des douze années de sa présidence, réellement contribué au rayonnement de son association et donc du château. La qualité de ses relations avec les American friends of Versailles et la Versailles Foundation aura eu un impact très appréciable sur la mise en œuvre de beaucoup de projets.
Je le vois quitter ses fonctions avec regret, espérant que le futur bureau que l’association se donnera, saura aborder la prochaine période de son existence dans un esprit d’efficace service. Il ne m’appartient pas de m’ingérer dans ce processus. Je suis cependant attaché à ce que l’Etablissement et l’Association considèrent qu’ils se retrouveront sur des objectifs partagés. La convention qui lie les deux parties est en cours de rediscussion. C’est donc avec le futur bureau qu’il appartiendra à l’Etablissement de conclure le cadre qui présidera à leur relation.
Collections nationales
Je consulte le catalogue d’une vente de Sotheby’s qui aura lieu à New York, le 4 juin prochain. Vente classique de « Old Master Paintings, European Sculpture and Antiquities ». Tout un lot de peintures est vendu par le Los Angeles County Museum of Art « au bénéfice des futures acquisitions », essentiellement de la peinture flamande dont un petit Rubens et des « Joueurs de cartes » de Gerard Ter Borch, mais aussi un Greuze et un Battistello. Ce sont quinze lots qui sont ainsi proposés à la vente.
Il y a quelques temps, le ministère de la Culture et de la Communication avait confié à Jacques Rigaud une mission de réflexion sur la question de l’introduction dans le droit français d’une possibilité plus large d’aliénation des œuvres qui appartiennent aux collections nationales. La règle actuelle est le principe d’inaliénabilité, étant entendu que par une procédure lourde et exceptionnelle, un objet ou une œuvre peuvent être « déclassés » (surtout si leur état ne justifie plus leur conservation) et voués à la vente ou à la destruction. Jacques Rigaud avait conclu à l’utilité de la pérennité de ce dispositif. Pour ma part, j’ai toujours pensé que la gestion dynamique d’une collection publique devait pouvoir avoir recours à l’aliénation à condition que cette décision soit prise dans les mêmes conditions scientifiques et administratives que celles qui président aux acquisitions. Cette faculté ne pourrait naturellement pas concerner les œuvres reçues en donation avant son instauration, ni la liste d’œuvres dont la propriété par la Nation serait déclarée imprescriptible à cause de leur importance historique et artistique. Le produit des ventes devrait impérativement être affecté à de nouvelles acquisitions sans que l’Etat et les collectivités, propriétaires de collections, se dispensent de garantir aux politiques d’achat de leurs musées les moyens budgétaires qu’ils lui consacrent déjà.
On verrait ainsi le métier de conservateur pouvoir se déployer avec plus de responsabilité encore et chacun s’efforcer, par l’application permanente d’un examen critique à la collection dont il a la charge, de tenter d’en porter la configuration au plus haut niveau possible de qualité ou d’exemplarité. La règle douillette de l’inaliénabilité permet, dans le fond, de somnoler sur la sédimentation de molles situations acquises et de ne pas trop s’interroger.
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