Je profite d’une accalmie du mauvais temps pour aller aux puces. C’est toujours par Paul Bert que je commence puisque c’est là, au-dessus du marché Serpette, que je me gare. A la mi-journée, il y a encore des places dans ce parking que j’ai toujours connu saturé, signes du ralentissement de l’activité que corroborent les plaintes des marchands qu’on finissait par ne plus écouter puisque la plainte sur les mauvaises affaires faisait partie de leurs récriminations ordinaires. Il est clair cette fois-ci que ces lamentations ne sont pas totalement infondées. Beaucoup de stands sont fermés et ont du mal à trouver repreneur. Certains marchands parlent de changer d’activités ou de se mettre au commerce « on line ». D’autres se rendent compte qu’ils doivent tirer leur activité vers le haut et redoublent d’ambition. C’est le cas de Pascal Cuisinier (Paul Bert, allée 6, stand 91) qui présente une exposition consacrée aux luminaires et mobiliers d’Alain Richard, créateur français né en 1926, et qui a participé avec les Pierre Guariche, Joseph-André Motte, André Monpoix… à l’épanouissement, après-guerre, de la « création industrielle ». L’exposition est remarquable. Elle est même accompagnée d’un catalogue réalisé par Pascal Cuisinier.
Un monument à la gloire de Versailles
Les éditions Citadelle & Mazenod font paraître un double album consacré à Versailles, réalisé sous la direction de Pierre Arizzoli-Clémentel. Ces deux albums illustrés de façon impressionnante par les photographies de Pierre Walter, rassemble un remarquable florilège de contributions historiques qui couvrent l’histoire du château de Louis XIII à aujourd’hui en passant par le règne des trois Louis, sans omettre celui de Louis-Philippe et, de façon générale, la contribution du XIXè siècle à l’identité actuelle du château. C’est vraiment impressionnant, encore que par son format et son poids, l’ouvrage soit d’une lecture difficile et que son prix (670 €) en fasse plus un ouvrage de bibliophilie qu’un outil de travail et d’étude. Dommage aussi que, dans les annexes, la liste des directeurs du Musée national des Châteaux de Versailles et de Trianon s’arrête à Pierre Arizzoli-Clémentel et ne mentionne pas son successeur, Béatrix Saule, et qu’on omette de préciser la liste des présidents de l’Etablissement public puisque depuis 1995 le Musée est pourvu de cette forme juridique. Hubert Astier, Christine Albanel et moi-même aujourd’hui auront autant compté dans l’histoire de la prise en charge du patrimoine de Versailles que bien des conservateurs dont le monument qu’est cet ouvrage veut bien rappeler le nom ! Je regrette cette petite « damnatio memoriae ».
L’ouvrage met bien en valeur l’œuvre « in progress » que n’a cessé d’être le château de Versailles. C’est ce processus de permanente reconstruction qui en a fait le monument complexe et parfois composite que certains ont déploré. Dès 1699, la Palatine écrivait « Le roi avoue lui-même qu’il y a des fautes dans l’architecture de Versailles. Au lieu de faire abattre le petit château et de faire un plan nouveau et vaste, il a, pour sauver le vieux château, bâti tout autour et l’a couvert en quelque sorte d’un beau manteau, ce qui a tout gâté ». Lui faisait écho, en 1733, Voltaire dans son « Temple du goût », où il écrit « Qu’on abatte au moins tout le côté de la cour afin qu’on ait point en France un chef-d’œuvre de mauvais goût et de magnificence ». Le « grand dessein » de la fin du XVIIIe siècle qui visait à donner une nouvelle unité à Versailles a failli lui donner raison. Si Ange-Jacques Gabriel a commencé cet ouvrage dont atteste aujourd’hui l’ « Aile Gabriel », d’autres architectes, Marie-Joseph Peyre, Pierre-Adrien Pâris et Louis-Jacques Durameau, Etienne-Louis Boullée, Jean-François Heurtier, y ont fait travailler leur imagination. Grâce au ciel, à l’impécuniosité du temps, à la Révolution Française, ces projets n’iront pas à leur terme et il nous reste toujours la trace de ce beau château de Louis XIV qui voulut religieusement conserver le fragment central de celui de son père, Louis XIII. Hélas du « palais marmoréen » pour reprendre la belle expression d’Alexandre Gady, nous n’avons plus l’escalier des Ambassadeurs, définitivement abattu en 1752, chef-d’œuvre du « premier Versailles ». Cet escalier donnait au château une entrée et un accès dignes de la demeure d’un grand roi.
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