Journal de campagne #5
Hier, dans la matinale de France Inter, Patrick Cohen reçoit Jérôme Chartier. C'est en direct que se fait l'événement. Une dépêche tombe. Elle annonce – et de toute évidence Chartier n'en était pas informé – que François Fillon reporte sa visite du Salon de l'agriculture programmée ce matin et fera, à midi, une déclaration. Aussitôt et pendant toute la matinée, toutes les hypothèses fleurissent. Que va t-il dire ? Que va t-il faire ? Que se passe t-il ? C'est vers 12h30, après une longue attente, que François Fillon parle enfin. Il annonce lui-même qu'il sera convoqué par les juges, le 15 mars prochain, pour être mis en examen. On se demande aussitôt si cette annonce rend moralement la persévérance de sa candidature possible. N’avait-il pas lui-même déclaré en août 2016, « qui imagine le Général de Gaulle mis en examen ? ». « Il ne sert à rien de parler d'autorité quand on n'est pas soi-même irréprochable ». « Avoir une haute idée de la politique signifie que ceux qui briguent la confiance des Français doivent en être dignes. Ceux qui ne respectent pas les lois de la République ne devraient pas pouvoir se présenter devant les électeurs ». Et pourtant, il déclare vouloir continuer son combat, et ne pas renoncer à sa candidature, contrairement à l'engagement qu'il avait pris de se retirer s'il était mis en examen. Comment ne pas rester perplexe devant cet entêtement fondé sur l'affirmation que le candidat qu'il est, devrait désormais bénéficier d'une trêve judiciaire, gage du bon fonctionnement de la démocratie. Cette revendication est absurde et même coupable. Absurde, parce qu’elle ne repose sur rien, sur aucune disposition de la loi ou de la Constitution. Coupable parce qu’elle permettrait à un candidat mis en examen de se faire éventuellement élire puis de bénéficier de l’inviolabilité attachée à la fonction présidentielle. La Constitution dispose en effet que le président de la République, « ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que faire l'objet d'une action, d'un acte d’information, d'instruction ou de poursuite. Tout délai de prescription ou de forclusion est suspendu. Les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre lui à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la cessation des fonctions » (Article 67 de la Constitution). On n'ose imaginer que François Fillon espérerait la réalisation d'un tel scénario. Ce ne serait pas convenable. Lui même, au début de ce que certains appellent – d'une façon que je trouve dérangeante – le Pénélopegate, n'avait-il pas déclaré « Il n'y a qu'une seule chose qui m'empêcherait d'être candidat c'est si mon honneur était atteint, si j'étais mis en examen ». François Fillon aurait été bien inspiré de s'en tenir à cette position. Il en serait sorti grandi.
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