Dimanche après-midi, BFMTV diffuse le meeting de Marine Le Pen, à Nantes. La candidate, juchée au sommet d'un emmarchement théâtral, y parade comme une Victoire aptère. Elle y parle de la France, mais d'une France dans laquelle je ne me reconnais pas, d'une France méchamment repliée sur elle-même. Ce n'est pas la France d'Aragon quand il écrit :
« Je vous salue, ma France, où les vents se calmèrent
Ma France de toujours, que la géographie
Ouvre comme une paume aux souffles de la mer
Pour que l’oiseau du large y vienne et se confie »
Dans la salle du Zénith de Nantes, l’assistance ponctue le discours de sa candidate d'interminables « On est chez nous ! », non pour faire la publicité du film de Lucas Belvaux, mais pour hurler son désir d'une « France aux Français », d'une France mesquine, réduite à sa caricature. « On est chez nous ! », que cette formule est révoltante de la part de ceux qui, au FN et parfois, hélas, ailleurs, se réclament des « racines chrétiennes de la France » ou parfois, quand ils veulent bien montrer qu'ils ne seraient pas antisémites, de ses « racines judéo-chrétiennes ». Sans doute ont-ils oublié l'injection du Deutéronome si souvent répétée dans la Bible « Vous aimerez l'étranger, car vous avez été étrangers dans la Terre d’Égypte ». Ils ne se souviennent pas plus de l'enseignement du Rabbi Jésus de Nazareth , « J'étais étranger et vous m'avez accueilli ».
En entendant « On est chez nous ! », on a honte, on a peur. Cette vocifération n'exprime pas le simple et légitime désir d'avoir un « chez soi » et d'y être heureux avec les siens et les autres, mais vomit le débordement d'une effrayante effervescence d’égoïsmes, de haines et de peurs. Penser ainsi, pour autant qu'on puisse employer le verbe « penser », c'est renier quelques siècles d'histoire de la France et deux millénaires d'histoire du christianisme.
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.