Depuis la Révolution au moins, l’Etat a, dans notre pays, une profonde méfiance à l’égard des « corps intermédiaires » qui font écran entre lui et les individus, sujets devenus citoyens. Il a, de ce fait, secrété une pensée, une doctrine, parfois une idéologie radicalement égalisatrice, hostile à tous les particularismes. En témoigne son combat contre la pratique des langues régionales et les patois. L’avènement de la pensée laïque, ou plus exactement du principe de laïcité, outre qu’ils reposaient sur un fond radical d’anti catholicisme, marquaient, dans le fond, le même désir d’éradiquer ce qui, dans la sphère publique, pouvait distinguer un français d’un autre. Les seules distinctions qui restaient plus ou moins tolérées étaient celles, pourtant lourdes, relatives au statut économique et social des individus. « Tous égaux » est devenu synonyme de « tous pareils ». Que constate t-on pourtant aujourd’hui ? C’est que nos sociétés sont devenues des sociétés composites où l’aspiration à l’égalité (et à la justice) n’enlève rien au désir de groupes d’individus de conserver et de transmettre les caractéristiques culturelles, linguistiques, religieuses… qui les distinguent des groupes majoritaires. Je ne vois pas comment la République pourrait faire l’économie de la révolution intellectuelle et politique que lui impose cette situation nouvelle. Nous devons bien inventer une nouvelle manière de vivre ensemble, avec sérénité, la diversité. Nous ne pouvons pas seulement nous satisfaire, de façon incantatoire, du « refus des communautarismes ». Ce serait trop simple.
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