Jardins
Sur France Inter, dans le « 7-9 du week-end » de l’excellent Stéphane Paoli, la rubrique hebdomadaire d’Alain Baraton qui répond aux questions des auditeurs. Alain Baraton est chef du service des jardins de Trianon. C’est une personnalité attachante apportant à la mission, dont il est chargé dans notre établissement, une vraie dimension philosophique, éthique, politique. Il sait penser la vie d’un grand jardin historique et projeter dans les travaux qu’il conduit une fine intelligence historique et toute l’étendue des préoccupations contemporaines quant au développement durable. C’est lui qui m’a convaincu, à l’automne dernier, d’introduire des ruches (ces « sentinelles de l’environnement ») à la ferme de Marie-Antoinette.
Inauguration des ruches à la ferme de Marie-Antoinette, © EPV / Jean-Marc Manaï
C’est lui encore qui avait souhaité recréer une vigne à Trianon. La récolte 2008 a été bonne. Nous en avons confié la vendange et la vinification à la Confrérie du Vin de Suresnes. Très prochainement nous irons à Suresnes en «taster» le résultat. Alain Baraton évoque une polémique qui, semble-t-il, s’est développée sur une question concernant la fourniture en graines du Potager du Roi qui, rappelons-le, ne relève pas, pour l’instant, de l’Etablissement mais de l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage et donc du Ministère de l’Agriculture. Ce n’est pas par ambition « impérialiste » que je souhaiterais que ce chef-d’œuvre qu’est le Potager de Versailles rejoigne le domaine dont l’Etablissement public de Versailles a la charge, mais bien parce que l’histoire et la meilleure compréhension par le visiteur de ce que fut, sous l’Ancien Régime, la véritable « cité du château de Versailles », l’exigerait. La déambulation fluide d’un visiteur du château, à l’Orangerie, à la pièce d’eau des Suisses, jusqu'au potager serait un enchantement, malgré la brutale coupure de l’actuelle route départementale 10 qu’il faudra pouvoir enterrer (je crains que ce ne soit pas possible !!). Il conviendrait, bien sûr, qu’une convention entre l’Etablissement Public et l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage règle le nécessaire accès de l’Ecole aux espaces du potager et à leur usage. J’ai déjà fait part à Michel Barnier, ministre de l’Agriculture, de mon intérêt pour une association de ce type.
Je tiens à cette occasion à rappeler que la responsabilité de nos jardins relève de deux personnalités compétentes, Alain Baraton, disais-je, pour le parc et les jardins de Trianon, Joël Cottin pour le jardin du Roi, c’est-à-dire ce formidable enclos de parterres, de bosquets et d’allées qui entourent le château lui-même.
Tempête
Dans l’après-midi, Thierry Webley, directeur de l’accueil, de la surveillance et de la sécurité, m’avertit de l’avis de tempête de la météorologie nationale pour la nuit du 17 au 18 et la matinée du 18. C’est un avis de tempête moyenne. Rien à voir donc avec les tempêtes de 1990 et 1999 et qui ont dévasté le parc et abattu des milliers d’arbres centenaires. La vigilance s’impose cependant. Il convient également d’apprécier l’opportunité d’ouvrir, demain matin, dans des conditions de sécurité suffisantes, le parc au public. Je suggère à Thierry Webley qu’il me rappelle le dimanche matin, à 8 heures, pour que nous constations, si la tempête menace toujours ou si elle s’est calmée de manière à ce que le parc puisse être ouvert sans danger pour le visiteur.
Echange de SMS avec une amie qui vit à Venise. Je lui écris « … ce soir, à Versailles, c’est la tempête ! Pourvu que les arbres tiennent… ». Elle me répond « Faut que tu courres de l’un à l’autre pour les retenir ! ». Dans le fond c’est un peu ça Versailles. Il faut toujours retenir, colmater, réparer. Un travail exaltant et sans fin. Je n’irai pas jusqu’à parler de Sisyphe mais il y a un peu de cela dans ce boulot. L’ambition de conduire quelques grands projets ne doit et ne peut jamais faire perdre de vue les mille détails qui, chaque jour, sollicitent notre attention et notre responsabilité.
Il y a quelques jours, on m’a signalé la situation préoccupante de beaucoup des arbres du domaine de Trianon, notamment parmi ceux replantés, (dans un bel élan de solidarité internationale, après la tempête de 1999. En effet, un parasite, dont la prolifération a été favorisée par les conditions climatiques des derniers étés, la zeuzère (et le bupreste me dit-on au service des jardins de Trianon), s’est introduit sous l’écorce de beaucoup d’arbres. Les larves de ce parasite se nourrissent de la sève et provoquent des nodulations non seulement disgracieuses mais, à terme, fatales à l’arbre. Je demande aux responsables de la direction du patrimoine et de son service des jardins de consulter des experts phytosanitaires, rapidement, de manière à ce que nous puissions prendre toutes les mesures adaptées à cette situation préoccupante.
Radio
De dix à onze heures, j’écoute, sur France Culture, l’excellente émission de Jean-Noël Jeanneney, Concordance des temps, consacrée cette semaine à l’élection de Barack Obama. Il y a chez Jean-Noël Jeanneney, une acuité de la culture historique et une diversité de la curiosité, époustouflantes. Il sait embrasser l’histoire de façon large, avec intelligence et générosité. Sans abuser de façon mécanique du procédé, il sait toujours mettre en évidence les ramifications contemporaines de l’histoire et les « leçons » qu’on peut en tirer. Ce sont toutes ces qualités qu’il met en œuvre dans l’organisation des « rencontres de l’histoire » de Blois où je fus invité à la dernière édition afin de participer à une table ronde sur les invasions barbares, sujet auquel j’ai consacré, à Venise, l’exposition Rome et les Barbares qui fut l’une des grandes joies de ma vie professionnelle.
Exposition "Rome et les Barbares", © Droits réservés
Je n’oublie pas non plus la cordialité qui marqua ma relation avec Jean-Noël Jeanneney quand, moi, ministre de la culture, et lui, président de la Bibliothèque Nationale de France, il m’appartenait de prendre en compte et de soutenir ses projets, notamment celui d’une bibliothèque européenne numérique, grand œuvre qui marquera de façon irréversible le bilan de son action à la tête de la Bibliothèque Nationale de France et dont Bruno Racine poursuit aujourd’hui avec talent la mise en œuvre.
La séquence suivante de la programmation de France Culture est consacrée à l’émission « Les rendez-vous de l'Histoire » de Dominique Rousset. Maryvonne de Saint-Pulgent, Pierre-Henri Tavoillot et Eric Mandonnet interrogent Gérard Larcher, nouveau Président du Sénat. Je dois dire que j’y prends beaucoup de plaisir. C’est vif, pertinent. Larcher y dévoile une intelligence fine et la belle indépendance de ses points de vue. C’est très peu « langue de bois ».
Ah cette fameuse vigne de la ferme du hameau !
Un journaliste s'en était étonné, et s'était vu reprendre de volée par Mme Albanel qui lui avait déclaré que jamais rien ne se faisait à Versailles qui n'ait au préalable l'assentiment des gens compétents. C'est assez précisément au moment où Versalia indiquait dans un article signé d'Annick Heitzmann qu'il n'y avait jamais eu de vigne à Trianon (N° 9, page 1223).
Par ailleurs je souris encore des propos très médiatiques tenus lors de la première vendange de septembre dont le Figaro reproduisait la teneur et qui annonçaient une "vendange tardive donnant un vin très féminin, très agréable à boire avec des glaçons". Difficile d'être plus ridicule en aussi peu de mots. Peut-on en attendre davantage d'une opération de pur marketing rebaptisant d'un nom aguicheur qui n'a aucune existence historique, le hameau de la reine dans lequel tout ce qui peut se voir aujourd'hui ne remonte pas plus loin que le XXe siècle?
Enterrer la départementale 10 n'est certainement pas impossible ! Il est seulement dommage que le coût d'une telle opération soit absolument dissuasif. Encore que... Des mécènes intelligents, cela doit bien exister aussi...
Rédigé par : Rozier-Chabert | 20 janvier 2009 à 14:37
Bonjour, Je ne sais pas si c'est mauvais pour les arbres, mais les quinconces de Trianon sont littéralement infestés de ces insectes rouges et noirs appelés "gendarmes" (Pyrrhocoris apterus)
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/1/1e/Pyrrhocoris_apterus1.jpg
Rédigé par : Pierre | 21 janvier 2009 à 10:55
Monsieur,
Ce que j’ai écrit au sujet de la vigne de Trianon, le samedi 17 janvier 2009, suscite votre réaction. Dois-je préciser que je ne me suis pas prononcé sur le caractère historique de la vigne ni sur celui d’une activité de production de vin à Versailles ? Rien ne dispose d’ailleurs Versailles à cette activité, ni la nature des sols, ni leur relief, ni le climat… A mes yeux la vigne est un élément charmant de cette campagne rêvée du Hameau de la Reine où rien ne manque, ni les étables, ni une laiterie. Quand cette vigne produit du raisin, autant le vinifier, sans prétendre – j’en conviens – produire le « vin de Marie-Antoinette ». Je vous inviterai à en boire un verre sans vous garantir que ça vaudra un Chassagne-Montrachet !
Rédigé par : Jean-Jacques Aillagon | 21 janvier 2009 à 18:51
Bonjour,
Felicitation pour votre blog qui nous donne un rayon de soleil par ses temps maussade. Je voudrais juste reagir sur le fait que vous citiez M Baraton comme un modele de devellopement durable. Ne serait ce pas ces services qui font appel à des taupiers professionels pour pieger ses pauvres animaux aux explosifs. De plus l'ensemble des allées et massifs du parc de trianon ne sont t'il pas traitées chimiquement par une societe privé. Es ce compatible avec une vigne et des abeilles sentinelle de l'environement.
Encore bravo pour votre style incisif et novateur à diriger versailles
Rédigé par : Jules cesar | 22 janvier 2009 à 17:01
Bonjour,
Il n'était pas utile de préciser que vous n'étiez pas du tout en cause dans cette "affaire" de vigne, et il n'entrait pas dans mes intentions de laisser penser que vous auriez pu l'être. C'est plus clair maintenant, et vous avez trouvé le mot exact pour qualifier la chose: "charmant".
Charmant, c'est-à-dire futile dans le meilleur des cas, et si on veut aller plus loin dans l'étymologie, trompeur et mensonger...
Si j'ai relevé cette péripétie, c'est qu'elle m'a semblé symptomatique d'une dérive insidieuse qui conduit à n'agir que dans le but d'une occupation des médias destinée à capter des parts de marché. On en vient à ne penser que le court terme, dans le seul but de séduire ou de provoquer, de "faire des coups"...
Puisque vous avez le privilège de pouvoir parcourir quotidiennement les jardins, un privilège que je possède également, mais comme simple promeneur, vous ne pouvez pas ne pas avoir constaté l'état inqualifiable des sols tout autour du bassin d'Apollon. On pourrait presque penser à une piste d'essais pour 4x4: énormes plaques de bitume disjointes et découpées par endroits au carré et jamais rapiécées, flaques quasi permanentes, plaques de béton dépassant du niveau environnant, etc.
Or il s'agit du lieu le plus fréquenté du parc, celui vers lequel convergent tous les touristes qui risquent à tout instant une foulure ou la chute lorsqu'ils désirent enjamber une flaque persistante... Une image peu flatteuse du prestige censé attaché au nom de Versailles et un mépris, dévenu évident avec le temps, de la sécurité des promeneurs.
Qu'il soit clair pour tout le monde que je ne vous pense responsable en rien de cet état actuel que vous devez constater. La question que je vous pose est celle-ci: avez-vous le pouvoir et la volonté de mettre fin à cette situation?
Ou bien, allez vous tout bonnement vous inscrire dans la longue liste de ceux qui n'ont rien fait?
Rédigé par : Rozier-Chabert | 23 janvier 2009 à 10:22